Oui, oui,
bonne année, bonne santé, et beaucoup de bonheur, à tout le monde
sans distinction... Paix sur la terre, au moins une fois, entre
minuit et minuit deux minutes, le temps d'embrasser chaleureusement
tout le monde et puis chacun retourne à ses soucis, ses petites
« crisouilles », ou ses grandes angoisses... Voilà ce
que je me dis de façon mélangée depuis des années au fameux
moment du passage d'une année à l'autre. Cela génère un certain
stress à l'approche des fêtes : Serais-je à la hauteur de la
joie collective, car dans tout les cas, je ne suis pas à la hauteur
d'assumer la solitude engendrée par le choix éventuel de rester
chez moi ce soir là... Ben oui, j' ai envie de ma petite part de
rêve aussi...
Cette
année donc, je fus invitée avec toute la petite famille, à fêter
le réveillon sur la commune de Rouvenac, au lieu dit « Toziels » :
un éco-hameau, où nous sommes, pour la troisième reprise,
accueillis, dans le cadre de notre projet, afin d'hiverner ou revoir
notre spectacle, ou bien encore faciliter nos démarches en
communication.
Aaah !
Les Toziels, (entendez par cette appellation « les oiseaux »),
quel merveilleux lieu pour y retrouver des amis, faire la fête et au
petit matin y entendre les oiseaux, qui ont, en effet et étrangement,
le chant très actif en ce lieu particulier ! J'étais donc
ravie d'y être invitée en cette période toujours un peu confuse
pour moi. Il était demandé à chacun d'emmener un plat de sa
composition et une bouteille afin de participer équitablement au
repas : formule très sympathique , économique, et généreuse
qui fait toujours ses preuves. Nous avons dansé comme des petits
fous, nous avons bu très raisonnablement, nous avons mangé plus
qu'à notre faim sans gaspiller pour autant, nous avons passé un
moment agréable, plein de chaleur et d' humour, tous âges confondus
avec ceux que l'on ne connaît pas, ceux que l'on connaît bien, et
ceux que l'on connaît de vue...
Alors
comme à l' habitude, et juste pour faire mon « enculeuse de
mouches », je me suis demandé qu'est ce qui pouvait bien
clocher (on ne se refait pas!), et en regardant autour de moi ce soir
là, je n'ai rien vu qui clochait, si ce n'est... Que toute cette
joie, faite de choses si simplement partagées, le repas, les
boissons, les gâteaux, la musique, la danse, les paroles drôles,
toutes ces choses contrastaient tellement avec l' austérité
ambiante : la crise avec laquelle on nous rabâche les oreilles,
nos plaintes, et nos inquiétudes quotidiennes, notre pouvoir
d'achat qui diminue... Créant parfois pour finir, une espèce d'hystérie
collective à l'approche des fêtes, comme si, à force de vivre
tendus, ils nous fallait absolument lâcher la pression, comme si les
fêtes étaient alors l'occasion d' un exutoire, et que l'espace de
cet instant court, trop court, on s' autorisait enfin un lâché
prise total, voir un dérapage non contrôlé... Y' a qu'à se
promener dans les grands magasins durant cette période particulière
pour tâter l'ambiance ! Faut voir les étals qui dégoulinent
d' huîtres, de chocolats, de boissons alcoolisées, de bûches de
Noël, de jouets en plastiques et de cadeaux en toc. Finalement, souvent, loin de l' idée de crise ambiante, on finit tout au plus avec une
bonne crise de foie qui contraste indécemment avec l' économie
austère dans laquelle nous prétendons vivre...
Au
« Toziels », rien de tout cela. C'était une vraie fête
et je jure que personne n' a manqué de rien, il y avait de tout, du
très bon, et rien de trop... Il y avait l'amitié, la joie, l'
abondance, et la danse, toutes les choses essentielles aux rites de
passage et qui partagées unanimement par les vieux et les jeunes
transforment nos peurs et nos doutes, en moments festifs, en rituels
pour passer d' une époque à une autre. L' occasion d'ailleurs à ces
moments, d' émettre tout haut des vœux que l'on porte
pour soi et pour les autres: des vœux très singuliers porteurs de
changements éventuels et du meilleur pour nos vies.
Alors
voilà, beaucoup de mes vœux personnels étant accomplis ou en voie
de l'être, j'ai fait le vœux que ce genre de « fête »
soit possible pour tous, que les êtres humains pauvres ou riches,
vieux ou jeunes, d' ici ou d'ailleurs, puissent comme moi, se sentir
entourés, et ainsi, partageant ce qu'ils ont en toute simplicité,
transformer leurs peurs et leurs angoisses en prières et en vœux
pour des lendemains plus heureux. Qu'ils puissent se souvenir tous
les jours que la crise ici, n' est souvent qu'une vague crise de foie
mais que les crises de foie, cachent souvent les grandes crises de
Foi et par là, nos manques à les combler...
Car
oui hélas, souvent nos "fêtes" ressemblent, si tristement, à des tableaux de
Jérôme Bosch où des monstres grotesques festoient pour oublier
leurs gouffres de solitude cherchant à se diluer dans l'alcool... Et
si nous réapprenions à vivre et partager ensemble quelque chose de semblable à ce qu'il m'est offert de vivre au "Toziels". Si l'on pouvait respecter l'espace personnel des
uns et des autres tout en partageant des moments généreux, alors chaque jour sans aucun doute, serait une
vraie fête, car le « meilleur », résolument, est dans
le partage, même dans la « crise » et même dans le
« pire »... Et si mon souhait se réalise, ce sera vraiment une bonne année pour
moi... Elle aura si joliment commencé avec mes amis sur la colline du hameau des oiseaux!
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