La note de l'écrivain

Le rêve c'est bien, mais la réalité est plus nuancée, plus complexe, terreau du meilleur parfois du pire. L'histoire humaine est jalonnée de rêves aux allures de cauchemars..

Le voyage que notre famille entreprend permet sans nul doute d'être témoins privilégiés de faits souvent ignorés ou mal évalués. Quand on vit, comme le plus grand nombre, abrité par quatre murs et un toit, on a parfois peur mais on suppose que le danger ne passera pas la porte, préférant regarder par la lorgnette (le petit écran) ce qui se passe au-dehors. Le danger n'est pourtant pas dans la réalité, mais dans le fait de ne pas vouloir la voir, où d' en nier une partie, car elle n'est ni bonne ni mauvaise, elle est ce qu'elle est.

Notre gazette s'invite dans vos boudoirs chaleureux, petit moment de pause, réflexions, idées, impulsions et initiatives pour que résolument attentifs, nous nous souvenions que notre humanité tient dans notre faculté à rêver et notre capacité à transformer nos rêves en réalité. Pour le meilleur et le meilleur!

lundi 4 novembre 2013

Quand le mal est fait.


Certains auront sans doute remarqué l’absence soudaine de mon article, posté le mois dernier sur la Gazette (« Propriété quand tu nous tiens… »). S’il m’avait fallu cinq jours de réflexion pour le publier car il impliquait deux de mes amis proches, il me fallut à nouveau trois jours pour le retirer car j’avais estimé l’article intéressant, suffisamment en tout cas pour le rendre public. Mais voilà, la manière dont cet article avait été écrit impliquait de façon directe, sans doute trop, deux de mes amis, et à la lecture de celui-ci, j’apprenais (par ma fille) que mon article avait fait souffrir non seulement les personnes directement impliquées dans l’histoire (ça je m’en doutais), mais par l’effet « du battement d’ailes des papillons », il avait également fait souffrir à l’exponentielle des personnes proches mais pourtant extérieures au récit.

Si, concernant mes amis, j’avais pris la peine d’évaluer durant 5 jours les risques que je prenais en publiant un tel récit, je n’avais pas mesuré les conséquences éventuelles que pourrait avoir l’histoire sur les personnes autour non impliquées. Concernant mes amis, je m’étais dégagée du problème, en considérant que le mal étant fait, je ne pouvais en faire plus, je ne pouvais que tenter d’analyser, par la retranscription des faits, ce qui au juste avait tant fait souffrir Xavier et moi-même, et par là ouvrir aux autres (par la publication) une réflexion sur nos façons d’aimer, nos limites, nos incapacités, et nos enfermements (la propriété ou la non-propriété pouvant être vécues comme des enfermements). Je ne me suis plus préoccupée de la souffrance de mes amis puisqu’elle fût exprimée par leur malaise au travers leurs propos, de plus, j’avais compris que notre seul départ ajouté à notre désolation pourrait peut-être les soulager. Je pense que ce fût le cas.

Certaines personnes m’ayant fait part de leur perplexité quant au retrait de ce texte et jugeant "peut-être injuste" de l'enlever, il m’apparaissait important d’expliquer les raisons de ce retrait. Je reparlerai donc encore certainement des questions suscitées par cet épisode douloureux de notre aventure, car lorsque le nomade voyage il est régulièrement confrontés à ces choses là avec plus ou moins de difficultés mais son vécu particulier peut aussi se rencontrer dans tout trajet humain, les blessures liées à ces expériences sont souvent aigües. En voyage, il est simplement plus facile de s’en dégager car les personnes rencontrées sur un terrain de tension ou de conflit, sont généralement inconnues : On lève alors les yeux au ciel et l’on se dit en ricanant « quel con ! » (Le con étant rarement soi-même, mais que l’on se rassure l’autre con pense bien sûr la même chose de vous !) et cela est facile car le dit « con » est souvent juste croisé et n’a aucun lien avec vous. Ce ne fût donc pas simple pour Xavier et moi, car ici, il s’agissait d’amis et il fût dès lors difficile de préserver la sérénité pourtant si nécessaire pour continuer notre route tout en préservant les moments de belles amitiés que nous avions partagés par le passé avec ces amis dont, à présent, nous heurtions brutalement mais bien  involontairement  les limites (et cela était sans doute réciproque). Mon objectif n’étant absolument pas de rajouter de la souffrance par-dessus la souffrance sans toutefois nier cette « incommodante » quand je la sens, j’ai donc décidé d’enlever sous cette forme peut-être « trop personnelle » cet article, ne voulant pas prendre le risque qu’il ne soit reçu comme un simple déballage émotionnel (surtout pour les personnes non impliquées) et non pas comme une réflexion et une analyse tirées d’un vécu douloureux, ce qui est, en tout cas pour moi, très différent.

Les questions restant actuellement posées et ayant pour moi un intérêt sont les suivantes : Que peut- on dire ? Comment peut- on le dire ? Si j’avais écrit une fable dont les initiales auraient été Y. et X., mon article aurait- il été mieux reçu par les personnes impliquées ? Faut-il se taire lorsque l'autre est inconscient? Pourquoi la souffrance est- elle toujours si difficile à recevoir ou à dire ? Faut-il protéger l’autre de sa propre souffrance par des tentatives d’évitement ou de silence ou encore de jugement et d’agressivité ? Lorsque l’on protège l’autre, n’est ce pas une manœuvre de l’esprit pour se protéger soi ? De quoi veut- on se protéger, si ce n’est d’un sentiment coupable inconfortable ? La souffrance n’est-elle pas le signe d’une limitation sans que cela implique obligatoirement la notion de culpabilité ? Les difficultés d’expression de soi ne sont elles pas liées à de la culpabilité ? La culpabilité n’est- elle pas toujours une « parade » pour éviter nos zones d’ombres (l’inconscience) ? Est –il possible d’être Humain (limité à un corps) et pourtant aimer (c'est-à-dire élargir nos limites à l’autre) ? Nos limites à l'autre ne sont-elles pas parfois des limites à nous-mêmes? Est-il possible d'aimer sans pouvoir poser ses propres limites?

J'aurais encore sans aucun doute à apprendre à me taire comme dirait Y. (une personne proche de moi que j'aime beaucoup, ne cherchez pas à qui appartient l'initiale, cela engendrerait sans doute des problèmes!). Mais cela ne veut pas obligatoirement dire "la fermer", cela veut dire poser les questions, utiliser les mots les plus justes, ce sont sans doute les moins blessants, tout en apprenant si il y a souffrance, à observer cette dernière sans la juger. Cela suppose aussi de pouvoir rester en-dehors du champs de souffrance de l'autre, car ce qui est à l'autre est toujours hors de portée et c'est cela même qui constitue la beauté et la difficulté du "voyage relationnel". Bref, j'ai encore quelques bons milliers de kilomètres à faire concernant ce voyage là, mais cela tombe bien car il est le seul qui m’intéresse réellement.

Les questions sont posées et j’aime qu’elles restent sans réponse, à dire vrai plus je vieillis moins j’ai de réponses radicales. Plus la réalité me semble complexe plus la notion de ce que l’on appelle « vérité » me semble indéfinissable et intimement liée aux seuls individus. Toutes ces questions constituent le terreau dans lequel j’évolue, et malgré le fait de ne pas vouloir posséder les réponses, je trouve pourtant intéressant de les poser encore et encore, et sans relâche car je constate que lorsqu’on croit avoir les réponses sur ces questions là, les pires dérapages ou les plus médiocres affirmations sont lancées, créant ainsi le vent, qui à son tour crée la tempête. La tempête passée, l’on constate les dégâts, les abîmes, les fossés et l’on se dit encore une fois, toujours une fois de trop : « Le mal est fait ! ». Ce n’est pas grave, ce sont juste des dommages,… Dommage, oui… Il y a sans doute à mieux vivre, à mieux être et nul n’est épargné par le chemin, je trace donc ma route et je ne doute pas que tout ceux croisés sur mon chemin continuent la leur, je leurs souhaite le meilleur comme à moi-même, même si pourtant souvent dans la tempête, l'on pense avoir vraiment rencontré le pire. Je termine par cette ultime question: Ne dit-on pas s'aimer pour le meilleur et pour le pire? Je tente une réponse: On a sûrement essayé de s'aimer...

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