La note de l'écrivain

Le rêve c'est bien, mais la réalité est plus nuancée, plus complexe, terreau du meilleur parfois du pire. L'histoire humaine est jalonnée de rêves aux allures de cauchemars..

Le voyage que notre famille entreprend permet sans nul doute d'être témoins privilégiés de faits souvent ignorés ou mal évalués. Quand on vit, comme le plus grand nombre, abrité par quatre murs et un toit, on a parfois peur mais on suppose que le danger ne passera pas la porte, préférant regarder par la lorgnette (le petit écran) ce qui se passe au-dehors. Le danger n'est pourtant pas dans la réalité, mais dans le fait de ne pas vouloir la voir, où d' en nier une partie, car elle n'est ni bonne ni mauvaise, elle est ce qu'elle est.

Notre gazette s'invite dans vos boudoirs chaleureux, petit moment de pause, réflexions, idées, impulsions et initiatives pour que résolument attentifs, nous nous souvenions que notre humanité tient dans notre faculté à rêver et notre capacité à transformer nos rêves en réalité. Pour le meilleur et le meilleur!

samedi 28 juin 2014

Limoux... Limoutarde me monte au nez !


« Alors ? Elle vous plaît notre région ?!... ». C'est la question que Pascal nous posait alors que nous buvions un verre en terrasse, un de nos jours de relâche. Et vraiment, je me suis demandé ce que je pouvais bien répondre à ce pauvre Pascal. On sentait d'emblée que lui, il l'aimait fort son pays de Limoux : sa douceur, ses joueurs de pétanque, ses petits vieux sous les platanes, son carnaval, ses petits commerces, sa blanquette, son « Toques et Clochers »... Oui, vraiment, j'étais embarrassée, car quelle part de mon identité fragmentée et névrosée devait donc répondre à l'enthousiasme confirmé de Pascal ? N'allais-je pas, une fois de plus, me montrer blessante par une réponse honnête mais à l'enthousiasme, disons... Euh... Comment dire... Euh... Les mots me manquent... Tiède ??? Je tentais donc une réponse « tiède », me rappelant qu'ici en France on pouvait apprécier une réponse aussi « Chiraquienne » que « je ne suis ni pour, ni contre, bien au contraire », et, en outre, qu'une part de moi étant définitivement marquée par le compromis et le surréalisme à la belge, une réponse toute en nuance devait donc être à ma portée... Ni froid, ni chaud, décidément « tiède » me rappelait au climat tempéré d'où je suis issue. Je répondais prudente...

« Écoute... Je suis partagée... Oui, oui, c'est une très belle région... Les paysages sont très jolis... La vigne... Les montagnes... La mer pas loin... La cité de Carcassonne... Les châteaux cathares... Les rivières... Tout ça, tout ça...». Mon interlocuteur se détendait, je marquais des points... J'enchaînais :  « Mais... Je m'inquiète de l'inertie du secteur... Nous venons de jouer, et nous peinons à remplir notre chapiteau... Dans une ville de 10000 habitants, cela m'inquiète et me désole... De plus, nous jouons en accès libre, ce qui ne suppose aucun engagement, ni aucune prise de risque pour personne ?!... ». Pascal répond :  « Ah bon ? Vous avez joué ? Mais où... Quand ? ». Face à mon silence dépité, il ajoute timidement : « Ah, c'est vous... Les roulottes à l'Espace Ruffié? ». Je me dis en moi-même que décidément je ne dois pas encore crier assez fort quand nous passons dans la ville tout les jours (entre autre juste devant la vitrine du commerce de Pascal) en hurlant que nous y sommes, en précisant à tue tête les heures, la nature du spectacle, son accès libre et le lieu précis où nous nous trouvons... Je me dis aussi que nos deux mille Gazette distribuées dans les commerces locaux et sur les marchés ne doivent pas suffire non plus, que peut-être aussi il serait bon de peindre nos roulottes en rose bonbon car nous sommes sûrement trop discrets. C'est vrai que nos amis d'« Ici et là » (restaurant à Limoux) nous ont informé qu'un voisin, habitant juste en face de là où nous jouions, n'avait compris qu'à la fin de notre série que nous étions une troupe de théâtre... Je me demandais pourquoi le fait de ne pas savoir de quelle nature était notre travail l'avait empêché de traverser la route et de faire 20 mètres pour venir s'informer... Peut-être la peur ? Peut-être une curiosité et un intérêt trop... Euh... Comment dire... Les mots manquent... Tiède ?

Je me demandais aussi si la presse (L'Indépendant) qui nous avait promis de nous envoyer un correspondant, et qui, au final, n'a rien publié du tout (le correspondant n'est jamais venu et n'a jamais appelé!) si, cet intérêt... Euh... Comment dire... Les mots me manquent... Tiède ?... De la presse locale sur Limoux n'avait pas pu contribuer à nous rendre la tâche encore un peu plus compliquée. Je continue à déplorer que les journalistes ne se déplacent pas pour venir voir le travail fait et réalisé. (un seul journaliste sur trois tournées qui malheureusement n'écrira rien sur notre spectacle car nous allions partir en dehors de son secteur). Je me posais aussi la question de savoir quelle était la part de responsabilité de la personne en Mairie à qui nous avions demander de faire suivre l'information via les panneaux lumineux de la ville et qui nous avait répondu oui, mais qui finalement et vraisemblablement ne savait pas sur quel bouton appuyer pour publier le petit texte que nous avions écrit, car j'ai eu beau regarder les panneaux, l'information sur notre présence ni est jamais apparue ?!... Alors c'est vrai, que comme me l'ont suggéré mes amis d' « Ici et là », une banderole supplémentaire avec écrit en grand dessus, mais alors en très, très grand « THEATRE DEAMBULATOIRE », pourrait être envisagée et nous allons encore une fois sortir les sous sous de la popoche pour la financer très vite... Mais je ne sais pas pourquoi, mon petit doigt me dit qu'elle ne suffira pas, voir même, qu'elle s'avèrera parfaitement inutile à nous remplir les chapiteaux... Car sur Limoux, alors que nous nous attendions à avoir un public nombreux, nous avons du annulé une représentation sur huit, et rempli péniblement des moitiés de chapiteaux et cela malgré le bouche à oreille efficace de notre public... Un bilan donc... Comment dire... Les mots me manquent... Euh... Tiède ?

Outre les pertes financières que cela engendrent, tout cela amène stress, tensions, fatigue, tristesse, découragement dont il faut encore se départir pour pouvoir continuer à faire notre travail correctement, à savoir, jouer . (Oui, oui jouer est un travail!). Car en réalité, aujourd'hui, nonante pour cent de notre temps (oui, là je dis nonante !!!) est non payé et est employé aux multiples démarchages pour la communication, il nous reste donc 10 % pour, créer autre chose (sans avoir de lieu de résidence, sans aucun moyen financier et avant la prochaine période d'élection ou en France, tout sera à nouveau bloqué pour approximativement 1 an) et bien sûr, il faut aussi sur ces 10% de temps, nous occuper de nos enfants qui partagent l'aventure avec nous. Il faut encore, puisque nous jouons en famille pouvoir protéger nos enfants de cette cruelle réalité qui nous use et nous malmène et ainsi espérer faire rêver... Mais bon, comme on nous le rappelle souvent NOUS NOUS sommes responsables de nos propres choix. (Pouvons-nous donc nous plaindre, mes enfants, eux, se plaignent de plus en plus mais c'est normal ils ne sont pas encore responsables.)

Car il faut faire rêver... Ça, le public s'en rend bien compte! Car le public en ce qui nous concerne est très généreux: nos chapeaux équivalent souvent à un prix payé en billetterie (la place entre 7 et 8euros). Le travail quand il est là, s'avère toujours payant. Ceci pour répondre aux gens qui nous suggèrent souvent de faire payer l'entrée et nous présentent cette solution comme LA solution miracle. Une fois pour toute, cela s'avère être un mauvais calcul, et nous pouvons parler d'expérience (Ayant joué une centaine de fois, on peut, sans être orgueilleux, parler d'expérience)... Le public, quand il est là, se montre... Comment dire... Euh... Les mots me manquent... Euh... Chaleureux? (Pas tiède quoi!)... Et grâce à l'accès libre, ce public est infiniment reconnaissant d'avoir été « libre » justement. Alors vraiment à Limoux et face à toutes les difficultés que nous rencontrons pour le moment la part de mon identité « Cléopâtresque », mise habituellement en veilleuse par cette autre fragment identitaire « Mère Thérésatesque », cette part donc, s'est sentie soudainement des envies de parler et elle hurle sans cesse que « Limoutarde lui monte au nez! ».

Quelques idées fulminantes, je le crains bien, pour calmer la Reine (du tiède ça n'ira pas), et je préviens les plus radins, il va nous falloir les moyens: Les prochains dépliants pourraient être balancés sur la population part voie d'hélicoptère et cela à 100000 exemplaires pour une population de 10000 habitants (Comptez en communication : 2% de réponses). On pourrait aussi envisager une participation des pompiers et du Samu pour soutenir, par leurs sorties intempestives, ma voix puissante mais qui ne suffit pas à faire entendre notre présence (ceci offrirait l'avantage d'éviter quelques unes de leurs sorties pendant que nous jouons), on pourrait aussi utiliser les facultés naturelles d'Erwenn et son énergie débordante pour l'armer vraiment (enfin !!!) d'une arme blanche et menacer les petits vieux qui passent à venir de force dans notre chapiteau (on s'occupe ensuite de les détendre par le caractère comique de notre spectacle), quant à la banderole supplémentaire, je suggère une banderole de 20 mètres de long sur 3 mètres de large tirée par l'hélicoptère cité plus haut. En outre, nous pouvons également, en plus des dépliants et des sets de table (tout nouveaux) actuellement distribués dans les commerces, nous pouvons fournir des figurines crées en Chine, figurines de nous en latex souple (nous sommes très souples),et, comme nous n'hésitons pas à faire travailler nos propres enfants, cela sans les payer bien sûr, (ce n'est pas de l'exploitation, c'est un manque de moyen), nous ne voyons aucun problème pour que les figurines soient peintes par les petits enfants chinois, nous pouvons aussi sortir des T-shirts avec nos minois dessus, ainsi les gens qui trouvent souvent que notre affiche est belle mais qui pourtant ne viennent pas au spectacle pourraient enfin nous porter fièrement sur leurs torses bombés et ainsi participer à moindre coût à nos multiples efforts de guerre. S'agissant d'ailleurs d'une guerre, nous pourrions préparer avec nos amis du « Chapeau rouge », « Les frères locomotives », et puis tout ceux qui le veulent (intermittents, cheminots, syndicalistes, chômeurs, mères et pères isolés, travailleurs précaires, commerçants mécontents,consommateurs au pouvoir d'achat diminué, femmes voilées ou non, femmes violées ou pas, ...), nous pourrions préparer un putsch local et armés de tout le brillant de nos costumes (de fête, du dimanche, d'ouvrier, de travailleur,d'apparat, de moine et de curé...), tirer à boulets rouges des tonnes de... Euh... De... De gelée de confiture non-bio et d' hamburgers de chez Mc Do sur le pouvoir en place (je propose stratégiquement, de commencer par les bureaux de mairie et d'enchaîner avec la presse, car cette dernière... n'aura pas manqué de se déplacer pour couvrir l'événement d'abord!). Si on pouvait faire un détour ensuite vers l'aire de stationnement des camping-caristes car y'en a certains qui n'ont pas bien compris le concept de propriété commune et ils chassent sans vergogne tout ce qui se comporte différemment (merci aux policiers de Limoux qui se sont montrés très bienveillants, oui, les policiers peuvent être bienveillants parfois, on pourra rester encore une semaine)... Ensuite, je propose d'armer, tout ceux qui participent à la lutte, de petites bombes de gaz hilarant et de tirer sans sommation sur tout employé de poste, inspecteur d'académie, professeur, secrétaire de mairie, où comédien qui fait la gueule, … Ah! Non... Merde... Ça c'est moi !... Et oui...

Prise dans mon rôle «  Cléôpatresque », j'avais oublié un instant qui j'étais vraiment ( mais n'est ce pas là le danger du pouvoir?), et la moutarde me montant au nez, j'avais oublié cette part de moi engagée résolument dans la paix, et malgré les soucis et malgré mon irritation, ce soir là, je regardais Pascal et je conclus en souriant : « Oui, Limoux, c'est une belle région vraiment, sa douceur, ses joueurs de pétanque, ses petits vieux sous les platanes, son carnaval, ses petits commerces, sa blanquette, son « Toques et Clochers », tout ça, tout ça... »

« Tiède »: me direz-vous?  Pour quelqu'un qui aime la paix, il vaut mieux "tiède"  que " froid ", je réponds. Car la vengeance est un plat qui se mange « froid », et croyez-moi qu'accompagnée de moutarde ou non, la vengeance reste la vengeance, la guerre reste la guerre, et le pouvoir, aussi petit soit-il, est rarement utilisé dans l'intérêt de tous. Non, décidément ma liberté réside seule dans ma liberté d'expression et mes costumes à moi sont réservés à l'usage de la scène pour le bonheur des uns et des autres (même celui des camping-caristes emmerdeurs!). Je ne suis pas née Reine, je suis née comédienne. Alors Oyez ! Oyez ! Venez nombreux à Albas les 5 et 6 juillet, car le courage on l'a, c'est du public qu'il nous faut !!!


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